Pour souligner l’importance du Volet Arst Médiatiques (VAM) du Festival International de cinéma francophone en Acadie (FICFA) dans l’écosystème artistique de Moncton et surtout pour souligner la contribution d’Angèle Cormier au succès de ce festival annuel depuis 2001, l’AGAVF a invité Angèle à nous parler de son expérience à la programmation du VAM : l’impulsion de départ ainsi que l’impact de l’événement dans la communauté au fil des ans.
L’AGAVF : Bonjour Angèle, merci d’accepter de me rencontrer pour ce bref entretien qui vise à mieux faire connaître le Volet Arts Médiatiques du FICFA et ta contribution à son succès au fil des ans.
Quelle était l’impulsion pour la création du VAM ?
Angèle Cormier : C’est un volet qui existait depuis quelques années avant mon arrivée, je pense que ça s’appelait programmation Nouveaux médias, c’est Tam-Ca Vo-Van et Stefan St-Laurent qui l’avaient mis sur pied lorsqu’ils travaillaient au FICFA. Je suis entrée en poste après leur départ en 2001. Ça faisait quelques années que j’avais fini mon bac en Arts visuels, j’étais très impliquée à la GSN, puis je commençais aussi à travailler en événementiel. Quand la directrice du festival m’a approchée pour coordonner ce volet, j’ai tout de suite accepté!
À l’époque, il y avait ici très peu de production en arts médiatiques On présentait beaucoup d’artistes d’ailleurs. On n’avait pas non plus les partenaires de présentation que nous avons maintenant, donc je me retrouvais souvent à louer des espaces en ville pour présenter les œuvres (film/vidéo). On lançait des appels de dossiers et on recevait aussi des propositions de distributeurs de vidéos d’art. À l’époque, on recevait tout ça en VHS!
Au fil des ans, on a créé des événements comme le ciné-parc du VAM, Acadie Underground, Séances éphémères et Objectifs obliques pour développer la pratique des arts médiatiques à Moncton. Maintenant, le VAM consiste aussi à mettre en valeur les programmations des partenaires comme la Galerie d’art Louise-et-Reuben-Cohen, la Galerie Sans Nom et l’Atelier Imago en plus des soirées de projections. Ça permet d’en faire un peu plus avec nos budgets qui ont peu progressé depuis le début du festival.
Quels sont ses objectifs?
AC : L’objectif principal est de mettre de l’avant la production indépendante en arts médiatiques par l’entremise d’expositions et de projets de création.
Comment faites-vous la prospection pour la programmation ? Quelles sont les stratégies de programmation?
AC : On ne fait plus d’appels à dossier car on mise plutôt sur la commande d’œuvres de création inédites pour les soirées de projections (Acadie Underground, Séances éphémères et Objectifs obliques). Pour Objectifs obliques, on donne carte blanche aux artistes et le résultat est toujours impressionnant. Les artistes se prêtent au jeu inspiré des « stratégies obliques » de Brian Eno et de Peter Schmidt. Si après quelques années on a proposé aux artistes de travailler en équipe de deux, c’était pour jumeler des artistes de diverses disciplines avec des artistes médiatiques plus expérimenté.e.s.
Les créations du programme Objectifs obliques sont disponibles sur le canal vimeo du FICFA après un embargo d’un an car, pour appuyer les artistes, certains films sont distribués dans les divers circuits de festivals. L’artiste retient ses droits d’auteur sur son œuvre et peut en disposer comme il ou elle le souhaite.
Quels sont d’après toi les impacts du VAM dans l’écosystème artistique de Moncton ? du NB? et au-delà ?
AC : Je pense que, sans le VAM, il y aurait beaucoup moins de production en arts médiatiques dans la région. C’est juste depuis quelques années qu’il y a quelques cours en arts médiatiques au département des arts visuels à l’Université de Moncton. Il n’y a pas de programme d’études en cinéma et il n’y pas de centre d’artistes en arts médiatiques.
J’essaye toujours de proposer une programmation qui tient compte des intérêts des artistes pour les rejoindre là où ils et elles sont rendu.e.s. Je dirais qu’au cours des 10 dernières années, les projets visent le développement de la pratique pour les artistes de la région en explorant le Vjing, le mapping, le montage, le DIY, l’installation, la performance… On est là pour inciter les artistes de toutes les disciplines à diversifier leurs pratiques artistiques en leur permettant d’explorer toutes les formes de l’image en mouvement.
Plusieurs des artistes qui ont réalisé un premier film au VAM ou qui ont participé à un atelier quelconque ont entrepris ensuite d’autres projets ou intégré la vidéo à leur pratique ou travaillent maintenant dans le domaine du cinéma.
En termes d’impact plus large, plusieurs films se rendent dans d’autres festivals et plusieurs se sont rendus à Talent tout court de Téléfilm Canada, au Marché du Film du Festival de Cannes.
Me raconter un bon coup…
AC : J’avais acheté un émetteur FM puis on faisait un ciné-parc à l’extérieur du théâtre l’Escaouette. À l’époque, le festival était en septembre. Puis, lorsqu’on a déplacé le festival en novembre, il a fallu que je trouve une nouvelle idée de projet parce qu’on ne pouvait plus faire le ciné-parc. C’est en discutant avec Amanda Christie que j’ai découvert les cartes Oblique Strategies de Brian Eno et Peter Schmidt puis c’est de là que j’ai créé l’événement Objectifs Obliques. Cet événement est devenu un incontournable pour le festival. Je suis fière de dire qu’il y a environ 75 court-métrages qui ont été réalisés depuis ses débuts.
Comment assurez-vous le renouvellement du public?
AC : Comme les créateurs sont pour la plupart issus de la communauté, et que plusieurs membres de la communauté participent à la création des projets, le public non seulement se renouvelle, mais augmente d’année en année avec l’ajout de nouveaux « joueurs ». L’événement désormais « culte » après sa 12e édition est un moment fort et très attendu du FICFA.
Merci!
Angèle Cormier, en plus d’être commissaire du VAM depuis plus de vingt ans, est présentement technicienne à la Galerie d’art Louise-et-Reuben-Cohen et au Musée acadien de l’Université de Moncton. Elle travaille principalement en sérigraphie à l’atelier d’estampe Imago. https://www.angelecormier.com/
On se rappelle que le FICFA a été créé en 1987 à l’occasion du Sommet de la Francophonie à Québec. La ville de Moncton avait alors été sélectionnée pour accueillir cet événement et rendre hommage à ceux et celles qui ont persévéré pendant des siècles pour conserver l’héritage de leur langue et de leur culture. La communauté a souhaité rendre l’événement annuel et, en 1992, Film Zone a été incorporé et assume depuis l’organisation du FICFA, son principal événement.